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Pourquoi l’Algérie ne se développe-t-elle pas ?

L’Algérie n’exploite pas ses nombreuses richesses et n’a pas su tirer les leçons des modèles sociopolitiques expérimentés à travers le monde. 

 

C’est une évidence de dire que notre pays est riche, tant elle regorge de ressources naturelles. Même si celles-ci ne sont pas inépuisables, l’Algérie est encore riche de ses terres en grande partie cultivables et de ses ressources humaines. Et pourtant, elle peine à se développer, c’est le moins que l’on puisse dire.

Au lieu de tirer leçon des échecs des modèles de développement qui ont été expérimentés depuis des années, elle continue à s’engluer dans ses politiques stériles. Plusieurs facteurs essentiels sont la cause de cette situation.

La faillite des politiques

Depuis la fin de la colonisation, l’Algérie était dirigée par une élite sans vision politique à moyen ou long terme. Cette élite, qui s’est substituée aux anciens colonisateurs, a été incapable d’ambition et s’est davantage préoccupée d’elle-même que des peuples dont elle prétend défendre les intérêts. Résultat Le système colonial a été purement et simplement perpétué sous une autre forme dans les domaines politique, économique et culturel au fil des années. À cela, il faut ajouter l’insécurité de l’environnement économique qui ne favorise pas les investissements, et le règne de l’informel.

L’indépendance est donc devenue une véritable dépendance vis-à-vis des puissances étrangères, en particulier de l’ancienne puissance coloniale française. Faute de réflexions endogènes ou prospectives et de volonté politique en vue d’amorcer un changement par une synergie d’actions, les politiques actuelles sont une navigation à vue. Le pays est géré à la petite semaine par les dirigeants, juste le temps d’accomplir les hautes charges qui sont les leurs.

Le marché de consommateurs

Il n’y a pas meilleur marché de consommation que l’Algérie. C’est ce que nous appelons, avec un certain humour, les «receveurs universels». Comment peut-on se développer quand on consomme tout ce qui vient de l’extérieur sans distinction et qu’on ne produit rien, ou pas grand-chose ?

Le comble, c’est que notre pays a le complexe suranné de la préférence étrangère. Même quand ce qui est produit localement est de bien meilleure qualité que ce qui est importé. L’extraversion est non seulement un phénomène économique, mais aussi culturel. Et cette tendance doit être inversée par la création et la recherche de qualité, afin que les produits locaux puissent être concurrentiels à l’échelle internationale.

L’Algérie ne doit pas être uniquement un marché de consommateurs bien au contraire, elle a tout intérêt à se lancer dans la production tous azimuts. En effet, les Algériens doivent encore prouver, comme qui dirait, qu’ils ne savent pas jouer que du domino.

La négligence de l’agriculture

L’agriculture a toujours été reléguée au dernier rang des activités humaines en Algérie. Le paysan est considéré comme un citoyen de seconde zone. C’est le moins que rien. La plupart des Algériens veulent être des commis de l’État.

Il faut bien le dire, depuis l’âge de la pierre, notre pays n’a remplacé l’outil agricole que par le fer. Rien de plus. Ce n’est pas avec la houe et la daba qu’on puisse se rendre autosuffisant alimentairement avant de parler de développer son agriculture à des fins de commercialisation ou de transformation. Comme les résultats d’investissements dans ce secteur ne s’obtiennent qu’à moyen ou long terme, cela intéresse peu les investisseurs étrangers et le pouvoir lui-même.

Pourtant, cela concerne la presque totalité de la population du pays. Avec une démographie galopante et un dérèglement climatique qui s’accentue d’année en année, les moyens agricoles traditionnels ne peuvent plus nourrir les nombreuses bouches tant qu’ils n’évolueront pas. Et un homme qui a faim est un homme qui ne pense pas, et par conséquent ne se donne pas les moyens de son développement.

L’inadéquation du système éducatif

Plus de cinquante après l’indépendance, le système éducatif ne s’est toujours pas adapté aux réalités du monde actuel et à l’évolution des sociétés. L’enseignement élémentaire reste à désirer. Et l’enseignement supérieur ne forme en grande partie que des diplômés sans emploi, incapables d’entreprendre ou de s’insérer dans la vie active dès qu’ils quittent leur formation.

Malheureusement, dans un tel contexte, l’enseignement technique et professionnel qui devrait être privilégié demeure le parent pauvre du système éducatif algérien. C’est une des questions essentielles du développement à laquelle il convient absolument d’apporter une solution adéquate. 

L’instabilité sociopolitique

On peut compter sur les doigts d’une seule main les gouvernements qui peuvent se targuer d’avoir connu une longue stabilité sociopolitique. Or celle-ci est une condition sine qua non du développement. Notre pays souffre de la faiblesse de son organisation sociale et politique. Tant et si bien que la conjugaison des conflits internes et des appétits voraces externes que suscitent ses richesses ne sont pas pour la prémunir de crises plus ou moins graves.

L’une des raisons à cette instabilité chronique et récurrente est la difficulté à s’approprier les principes de la démocratie. Qu’ils accèdent au pouvoir, au pire par un coup d’Etat, succession dynastique ou au mieux par des élections passablement démocratiques, nos  chefs d’État   finissent la plupart du temps par succomber à la tentation de la dictature. Grâce à l’absence d’armées républicaines, à la corruption, à l’analphabétisme d’une grande partie du peuple, au clientélisme, au culte de la personnalité. Toutes choses qui engendrent des conflits sociopolitiques. De manière inconsciente ou non, le peuple lui-même est une usine à dictateurs. 

La corruption

La corruption est un véritable fléau en Algérie, qui touche particulièrement les élites. En l’absence d’initiatives individuelles ou collectives de production de richesses, l’État reste la seule vache à lait. La politique est ainsi le plus grand pourvoyeur d’emplois et le seul moyen de s’enrichir de façon licite ou illicite sans travailler. Cet état de fait inhibe toute initiative et transforme certains agents de l’État, mais surtout ceux qui sont au pouvoir ou proches, en de véritables sangsues. Les économies en sont du coup gangrénées.

Si l’argent qui part en fumée par la corruption était effectivement investi en faveur des populations, l’Algérie aurait fait un grand bond en avant sur la voie du développement. Mais qui refuse de gagner de l’argent sans travailler ? Ils ne sont pas légion, ces agents de l’État ou hommes politiques. De nos jours, ils sont malheureusement comme des espèces humaines en voie de disparition.

La bonne gouvernance n’est pas le fort des dirigeants. Bien au contraire, c’est ce qui leur permet de rester au pouvoir en organisant des élections truquées d’avance par l’achat de conscience non seulement des électeurs en majorité analphabètes, mais aussi de ceux qui organisent les élections. Quand ils ne sont pas purement et simplement des dignes représentants de groupements économiques et politiques étrangers qui font feu de tout bois à cet effet.

Samir  Aboun

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