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mardi 16 avril 2024
ActualitéLe choc après la mort en prison de Kamel Eddine Fekhar

Le choc après la mort en prison de Kamel Eddine Fekhar

Kamel Eddine Fekhar, en détention provisoire depuis début avril dernier, est décédé ce mardi 28 mai à l’hôpital de Blida.

Ayant entamé une grève de la faim, avec son codétenu Ibrahim Aouf, militant mozabite lui aussi, Fekhar a vu sa santé se détériorer très rapidement. Toujours selon avocat, le détenu a été mal pris en charge au pavillon carcéral de l’hôpital de Ghardaïa, à environ 600 km au sud d’Alger, ville où il était emprisonné. « Les responsables de la cour de Ghardaïa ont-ils l’intention de liquider le Dr Fekhar physiquement, en pleine révolution, pour que cela se passe inaperçu et sans bruit ? L’épouse de Fekhar m’a appelé aujourd’hui, le 26 mai 2019, m’annonçant, dans une panique totale que son mari ne s’est même pas réveillé pendant toute la durée de sa visite, au pavillon carcéral de l’hôpital de Ghardaïa », a écrit Me Salah Dabouz sur sa page Facebook. L’avocat est lui aussi poursuivi par la justice pour ses accusations contre les magistrats de Ghardaïa. Aujourd’hui, l’avocat accuse la justice, notamment le procureur général de Ghardaïa, de « crime » ainsi que le personnel du pavillon carcéral de l’hôpital de la même ville.

Ce qui s’est passé

L’ancien élu du Front des forces socialistes (FFS), militant pour les droits de la communauté mozabite a été arrêté le 31 mars et mis en détention provisoire 72 heures après pour avoir affirmé dans une interview qu’il y avait « un traitement de ségrégation pratiquée par l’administration contre la population », selon son avocat. « Je dénonce cet acharnement et cette mort programmée, prévus par les autorités judiciaires de Ghardaïa. Kamel Eddine a été mis en détention pour un dossier vide décidé par le procureur général de Ghardaïa, exécuté par le juge d’instruction de la première chambre sous la pression du procureur de la république et du procureur général », a déclaré l’avocat Salah Dabouz sur une vidéo publiée ce mardi.

Kamel Eddine Fekhar a déjà été, en juillet 2015, emprisonné sur fond des violences intercommunautaires qui ont secoué, durant des mois, la région de Ghardaïa. Àl’époque, il avait passé presque deux ans prison, poursuivi pour dix-huit chefs d’inculpation, dont « atteinte à la sûreté de l’État », « troubles à l’ordre public », « incitation à la haine et à la violence », etc. Il avait entamé une longue grève de la faim et son cas a mobilisé des élans de solidarité à travers tout le pays. Les autorités reprochaient à Fekhar, fondateur du Mouvement pour l’autonomie du Mzab, ses « liens » supposés avec le Maroc et ses idées autonomistes. Pour les autorités, les affrontements intercommunautaires dans la vallée du Mzab (Ghardaïa et ses environs) seraient le résultat d’un « complot » étranger avec des complicités locales.

Le FFS accuse

Le FFS a déclaré que « ce décès survient après plusieurs semaines de détention abusive et arbitraire dans des conditions insoutenables et inhumaines ». « Le FFS n’a jamais cessé de dénoncer et de condamner ces atteintes graves aux droits de la personne humaine qui nous renseigne de la nature dictatoriale des décideurs de ce pays. Le FFS exige justice et vérité et que toute la lumière soit faite sur les circonstances de ce décès », lit-on dans un communiqué publié en fin de matinée de ce mardi. Le parti « exige la libération immédiate des autres détenus d’opinion qui croupissent d’une manière illégale et despotique dans les geôles de la mort et des pires entraves à la dignité humaine ».

Vives réactions

Les réactions se multiplient sur les réseaux sociaux : « Abattu. Sous le choc. Sans mots. Triste. En colère. Kamel Eddine Fekhar est mort en prisonnier politique. C’est une honte. C’est un crime abject », écrit le journaliste et documentariste Sid Ahmed Semiane. « La justice de l’après-22 février devra enquêter sur les circonstances du décès de Kamel Eddine Fekhar et poursuivre les responsables », estime pour sa part le journaliste Otman Lahiani. « Son “crime” : avoir donné une interview qui a déplu aux autorités. C’est-à-dire, un délit d’opinion », souligne l’éditeur et journaliste Arezki Aït Larbi. « La Ligue algérienne de défense des droits de l’homme [LADDH] tout en présentant ses vives condoléances à sa famille, tient pour seul responsable, le système, qui, par son mépris, son entêtement fait encore une autre victime après Talmat. » Le polémiste et journaliste Mohamed Talmat est mort le 11 décembre 2016 en détention, il était incarcéré pour « offense aux institutions et au président ». Ce matin, lors de la manifestation hebdomadaire des étudiants à Alger, sur une pancarte exigeant sa libération, une main a ajouté « DCD il y a 15 min ».

Par Adlène Meddi

Source : Le Point.fr

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